《Changement : Version Pile [French]》Chapitre 1 : Le réveil

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Un sentiment de puissance et d’adrénaline emplit mon corps. Une énergie pure, brute et presque violente me traverse, partant de ma poitrine vers chacun de mes membres. Je me sens électrisé, renforcé de l’intérieur par celle-ci. J’ouvre les yeux brusquement, et je commence à sentir comme un balancement tout autour de moi, ainsi que le bruit léger d’un moteur électrique. Je vois au-dessus de moi le toit bas d’une petite camionnette dans laquelle je suis allongé.

Je suis sur une couchette ressemblant à un lit d’hôpital, accroché par des cordes, desquelles j'extrais facilement mes mains. Elles étaient probablement juste installées pour que je ne tombe pas en route. Je ne porte qu’une simple blouse, blanche, et un caleçon que je peux sentir presser contre ma peau.

Deux personnes sont à mes côtés, deux filles d’à peu près mon âge. Je connais la première, cette jeune femme qui était dans mon rêve. Son nom est Aylin, si j’ai bien compris. En face d’elle, une deuxième fille est un peu penchée sur moi. Sa main est posée sur ma poitrine, à l’endroit même où j’ai senti cette vague d’énergie pure, indescriptible, rentrer dans mon torse. Elle a l’air à peine plus jeune qu’Aylin, elle doit donc avoir à peu près mon âge. Elle ne dégage pas la même sensation d’autorité et de majesté que cette dernière, mais elle est tout aussi impressionnante. Ses longs cheveux bruns descendent et ondulent dans son dos, et elle arbore une petite cicatrice en-dessous de son œil gauche, qui, combiné avec son grand sourire, dégage une étrange image de puissance et de férocité assez impressionnante pour une fille un peu plus petite que moi.

J’ouvre la bouche à plusieurs reprises sans savoir quoi dire pendant que les deux filles me regardent, tel un poisson bloqué dans un aquarium, mais je finis par me concentrer et me reprendre suffisamment pour leur adresser la parole.

-Qu’est ce qu’il… Ah. Mon rêve… ce n’était pas vraiment un rêve, c’est ça ?

La deuxième fille lève sa main de ma poitrine et regarde Aylin, qui n’attend pas longtemps avant de prendre la parole.

-Non, ce n’était pas un rêve, Nils. C’était la réalité, et tu es maintenant un Démon, tout comme nous.

Sa voix semble différente, plus réelle, moins fantomatique. Un millier de questions se bousculent dans ma tête. Où suis-je ? Qui sont-ils réellement ? Toutes ces histoires d’anges et de démons étaient donc vrai ?

Cependant, avant que je n’ai eu le temps de poser la moindre de ces questions, Aylin commence à répondre à certaine d’entre elle.

-Je n’ai pas vraiment eu le temps de me présenter durant ton rêve. Je m’appelle Aylin Valara, fille unique de Vassago, un des lieutenants de l’armée des enfers. Et voici, dit-elle en pointant du doigt la jeune fille en face d’elle, Sahana Kara, mon amie et garde du corps. Nous t’amenons à notre QG, au centre ville de Valiute, où tu pourras rencontrer tout les membres de notre groupe.

Valiute… ce nom me dit quelque chose. Je crois que c’est une ville du nord de la France, près de Lille. C’est une assez grosse ville, mais je n’y suis jamais allé. Mais avant de me disperser, il y a une question que je dois poser.

-Alors mes amis… ceux qui étaient dans ma classe… ils sont vraiment…

Je finis par me taire alors que je croise le regard grave d’Aylin et son petit hochement de tête. Elle pose sa main sur mon avant-bras, comme pour me soutenir. Sahana, elle, évite mon regard, regardant au loin, sans doute gênée par ce genre de moment.

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Et dans un éclair de souffrance, tout me revient. Je me souviens du bus qui s’était arrêté au milieu de la route, du chauffeur qui s’était effondré sous mes yeux, son corps presque découpé en deux par une épée large ensanglantée. Les cris, les pleurs, les portes du bus qui refusaient de s’ouvrir et tout les autres qui se faisaient massacrer, comme de vulgaires bêtes, tout autour de moi. Ceux qui avaient tentés de répliquer. Deux de mes amis, Louis et Ed, s’étaient jetés sur l’être. Enveloppé dans une cape pourpre duquel ne dépassait qu’un masque blanc, sans yeux ou bouche, celui-ci progressait méthodiquement, plantant son épée de manière bien trop calme et calculée dans les corps des jeunes lycéens, s’assurant bien de leur mort.

Lorsque mes deux amis l’ont attaqué, il les a rejetés violemment vers l’arrière du bus, où ils ont percuté les vitres arrières dans un grand fracas. Dans la panique, je me suis jeté sur une des boites contenant un marteau pour briser les vitres du bus, j’ai saisi l’objet, alors que le monstre continuait à avancer, silencieusement, et que tout les autres s’effondraient dans la douleur et les cris. Tout autour de nous, plusieurs alarmes résonnaient, ajoutant toujours plus de chaos. Une voix robotique, presque surréelle, décrivait les nombreux problèmes des systèmes du bus. Les coups étaient si puissants qu’ils tranchaient sans ralentir un seul instant à travers les sièges des fauteuils. Il était déjà arriver à la moitié du bus, et les gens commençaient à pousser vers le fond, s’éloignant de toute issue. Stefan, mon meilleur ami, s’était mis à côté de moi, et empêchaient les gens de trop me bousculer. J’ai saisi le marteau, et j’ai frappé de toute mes forces sur la vitre, qui affichait une image montrant qu’il s’agissait d’une vitre brisable. Sous la puissance de l’impact, ma seule issue m’a échappée des mains, et est tombée sur le fauteuil au dessus duquel je me tenais. Mes yeux se sont écarquillés alors qu’une sensation de désespoir s’emparait de plus en plus de mon esprit. Au moment où le marteau avait touché la vitre, un espèce de flash lumineux m’avait aveuglé. Il avait repoussé mon coup, et la vitre était resté intacte, comme intouchée.

Les quelques personnes, qui, dans leur panique, m’avait vu essayé de briser la vitre et s’était amalgamés autour de moi me fixèrent tous pendant une fraction de seconde, leur colère, leur haine, leur désespoir et leur peur me transperçant, comme autant de lames plantées dans mon corps. Et à ce moment, l’épée longue s’abattit. Et plusieurs personnes s’effondrèrent, dans des cris de peur et de douleur, implorant la merci du démon qui nous surplombait. Mais son bras ne faiblit pas, et les coups continuèrent de pleuvoir. À partir de là, mes souvenirs sont confus, trop confus. Je me souviens de Stefan hurlant, prenant le marteau dans ses mains, alors que je restait immobile, acceptant mon destin. Je me souviens du bruit des sirènes de la police, et du moteur des drones se rapprochant à toute vitesse. Je me souviens de la douleur dans ma poitrine, alors que je m’effondrait, que cette épée sanguinaire réclamait une nouvelle vie.

En levant ma main jusqu’à la poitrine, je sens immédiatement une irrégularité sur ma peau, une longue ligne qui ressort, et la douleur qui vient avec mon toucher. Je réussis à baisser mon regard, malgré les larmes que je retient difficilement, et je voit, à l’emplacement de mon cœur, une balafre blanchâtre, complètement cicatrisée.

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Je sens une larme solitaire couler sur ma joue. Je repense à eux, à mes amis, à tout ces gens que j’ai connu, et qui sont morts. À cette attaque. Et je me promets d’honorer leur mémoire. Je retrouverais celui qui les as tués, et je les vengerais.

Les quelques minutes qui suivent sont très silencieuses, aucun de nous trois ne dit quoi que ce soit. Je pense qu’Aylin et Sahana comprennent que j’ai besoin de silence, pour réfléchir.

Je ne cesse de me demander si j’avais pu faire quelque chose. Si j’avais réussit à briser la vitre, aurais-je pu les sauver ? Je ne sais pas, et cette ignorance me dévore de l’intérieur. Lorsque j’ai frappé avec le marteau… Cette lumière… Elle doit être magique, donc peut-être que si je découvre quelle magie fait ça, je pourrais retrouver l’assassin de mes amis.

Perdu dans mes délires de vengeance, mon cerveau commence à s’engourdir, et je plonge rapidement une nouvelle fois dans les ténèbres d’un long sommeil sans rêve.

* * *

Je me réveille un peu plus tard dans un lit bien plus confortable que la couche d’hôpital dans laquelle je me suis endormi. Je suis emmitouflé dans une couette molle et mon dos est enfoncé profondément dans le matelas sur lequel je suis allongé. Je remarque immédiatement que je suis complètement nu. Un rapide regard autour de la salle me rassure cependant. Je suis seul, dans cette petite chambre centrée autour du lit deux places dans lequel j’ai passer la nuit. Ou la journée. Je n’en sais rien, honnêtement. Sur les murs, la tapisserie grise semble avoir été posée quelques heures avant mon arrivée, et les quelques meubles, une penderie, deux étagères et un bureau, n’ont pas l’air plus ancien. Sur une chaise posée à côté de mon lit, je peut voir des habits assez commun, un jean noir, des chaussettes, un caleçon, et un t-shirt tout aussi sombres. Je me lève et m’habille rapidement, avant de me rapprocher de la fenêtre située en face du lit, à travers laquelle je peut enfin apercevoir quelque chose.

La lumière du jour qui vient du soleil levant éclaire légèrement quelques arbres surplombant un jardin assez grand, bordé de chaque côté par un mur de 3 mètres de haut. Je suis au deuxième étage, et ma position surélevée me permet d’apercevoir les rues qui bordent un des côtés du mur. L’activité et les buildings qui s’étendent à perte de vue m’indiquent que nous sommes sans doute au centre ville de Valiute, donc dans le fameux QG d’Aylin. Ces immeubles dépeignent une scène surréelle, que je ne peux qu’imaginer, de cette maison à l'air ancienne au milieu des tours noirs et lumineuses modernes. De ce jardin immaculé dans cet océan de technologie, survolé à chaque instant par un drone différent.

En parlant de modernité, je sens une inquiétude monter en moi. Je touche mes poches et commence à fouiller la chambre, un peu paniqué, presque submergé par ce moment d’angoisse pourtant si familier, avant de tomber sur mon téléphone, tranquillement posé sur une plaque. Je l’ouvre, et vérifie s’il est chargé à bloc. L’écran se déplie, et l’icône de la batterie pleine, tout comme ces quatre symboles, 100 %, me rassure rapidement. Avant de pouvoir l’étudier plus en détail pour vérifier si quoi que ce soit a changé, j’entends toquer à la porte.

Je me retourne vers celle-ci, hésitant à répondre à la personne qui vient de toquer. Je suis convaincu qu’il doit s’agir d’Aylin, ou peut-être de Sahana, mais la voix grave et masculine d’un homme âgé me contredit quelques secondes après.

-Monsieur Nocquat, puis-je entrer ?

Surpris par cette voix, je réponds sans même y réfléchir.

-Oui, oui, rentrez.

La porte s’ouvre quasi immédiatement, et je suis salué par un homme d’une soixante d’année, dont le visage couvert de rides et les cheveux blancs n’ont pas réduit un instant la présence et le charisme. Il est petit, bien plus que moi, mais se tient droit et fier et arbore ce qui ne peut être qu’un habit de majordome. Il rentre dans la pièce silencieusement et, alors qu’il refait le lit, m’adresse une nouvelle fois la parole.

-Vos camarades vous attendent en bas, au rez-de-chaussé. Ils seront ravis de vous rencontrer.

Toujours aussi impressionné par l’homme, je hoche la tête et quitte la salle silencieusement, pour me retrouver devant un grand escalier, avec deux voies montantes au centre et une descendante sur chacun des côtés. L’endroit est très classieux et dégage toujours cet aspect un peu ancien, comme sorti tout droit d’un musée ou d’une série. Le sol est en marbre et des grands tapis en recouvrent une bonne partie. Je descend les marches silencieusement et traverse les étages jusqu’au rez-de-chaussé, sans réellement savoir où ce chemin m’amènera. En bas, je fais face à un grand hall et à une grande porte en bois, qui doit mener à l’extérieur, comme l’indiquent les larges fenêtres la bordant des deux côtés.

À ma gauche et à ma droite, deux portes plus petites donnent accès à d’autres parties du bâtiment, qui me fait de plus en plus penser à un véritable manoir. L’affirmation du vieil ange selon lequel les démons profitent des humains à sans doute au moins une part de vérité, au vu de cet endroit. Le fait que rien ne soit automatisé, et l’absence évidente d’HI me perturbe, mais en même temps, je me dis que magie et technologie ne fonctionne probablement pas si bien ensemble.

Une des portes est orné d’un petit écriteau indiquant la mention ‘salon’. Si ces ‘camarades’ m’attendent, c’est très probablement ici qu’ils se trouvent. Je prends une grande inspiration, encore hésitant, mais je me rassure. Je n’ai pas survécu à tout ça pour rien. Je vais tout faire pour devenir puissant, suffisamment pour venger mes amis, et ça commence ici, dans cette salle devant moi.

Les Démons n’ont pas l’air mauvais, en tout cas ceux que j’ai rencontré jusqu’à maintenant, Aylin et Sahana, contrairement à ce que le terme démon sous-entend. Je me dois de leur laisser une chance, et de toute façon, j’en suis un aussi maintenant, alors je n’ai pas vraiment le choix.

Je dois faire face, rencontrer ces gens.

Je m’avance vers la porte et saisit la poignée. Je souffle une dernière fois, et l’ouvre en grand.

Je suis prêt.

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