《[French] Les Pions de l'Equilibres》Chapitre 14.5 - T'as un stylo ?

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Contrairement aux cours d'art, Dany suivait avec Esh les cours d'économie.

̶ Avec toutes les entreprises que ma famille possède, ce n'est pas vraiment comme si j'avais le choix. Mon père n'arrête pas de me répéter que la vraie fondation d'un clan ou d'une secte, ce n'est pas leur avancement sur le Chemin, mais leurs capacités économiques, lui avait-il expliqué, quand Esh lui avait demandé pourquoi il avait choisi cette option.

Esh avait souri intérieurement :

Père a dit quelque chose de similaire, mais sans, bien sûr, réduire à ce point le rôle du niveau de cultivation des membres des familles et des sectes.

Quand Kesef, leur professeur d'économie, fit son entrée dans la classe, Esh ne put s'empêcher de se demander si ne serait-ce qu'un seul des professeurs du collège pourrait être qualifié de normal. Il avait des cheveux blonds qui, de manière inattendue, pointaient vers le haut comme si la gravité était inversée. Plus surprenant encore, il portait une veste argentée constituée de pièces de monnaie qui pivotaient sur elles-mêmes, lui conférant un aspect hypnotique.

̶ Yo les gosses, asseyez-vous et prenez des notes.

La majorité des élèves de la classe ne purent réprimer une grimace en entendant la manière avec laquelle le professeur s'adressait à eux. Ils avaient, après tout, tous passé la cérémonie de la responsabilité, et s'étaient engagés sur le Chemin, ce qui faisait d'eux des Aspirants. Être qualifiés de « gosses » les ramenait à une époque qu'ils pensaient avoir franchie.

Mais la raison pour laquelle Esh avait la même expression que si Pisga venait de faire son entrée dans la classe était tout autre : il n'avait pas amené de matériel pour écrire. Il ne put s'empêcher de s'administrer une claque mentale. Il était pourtant évident qu'une matière aussi théorique que l'économie allait nécessiter du matériel d'écriture. Il lança un regard implorant aux élèves autour de lui, mais même Dany assis à côté de lui ne put que hocher la tête :

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̶ Désolé, je n'ai qu'un seul stylo, mais je peux te prêter une feuille, dit-il, tout en insinuant clairement du regard qu'il devrait lui en rendre une en retour au cours de la semaine.

Avant de faire son entrée au collège, Esh n'aurait jamais considéré un stylo et une feuille comme des matériaux précieux, mais ceux requis par l'établissement étaient spéciaux. En effet, le matériel d'écriture des Aspirants se devait d'être spirituel, en plus d'être virtuellement indestructible face à des Immobiles. Un document écrit en encre spirituelle sur une feuille créée spécialement à cet effet permettait à quiconque d'assimiler une information bien plus facilement, surtout si l'encre était induite d'un type d'élément compatible avec son lecteur. Il en résultait que même la feuille spirituelle la plus basique coûtait au moins une pièce d'or quand elle était achetée au détail, ce qui était plus que le salaire quotidien minimal d'un habitant du village. Et ceci n'était rien comparé aux stylos spirituels qui coûtaient au minimum cinquante pièces d'or. Evelle lui avait même révélé que son père lui avait offert un stylo à 300 pièces d'or pour la récompenser d'avoir passé les tests pour passer en troisième année de formation du collège.

Voyant la situation fâcheuse dans laquelle se trouvait son élève, le professeur lui passa son stylo de manière condescendante :

̶ Fais-y attention, p'tit. Il vaut sûrement plus que ce que ton père gagne en un an, l'avertit celui-ci.

Esh fut momentanément pris de court, avant de se demander la tête que ferait le professeur s'il apprenait l'identité de son père.

La suite du cours se déroula normalement. Le professeur expliquait des concepts socio-économiques dont personne n'avait jamais entendu parler, tels que le capitalisme, le socialisme et le communisme.

Le seul problème, c'était qu'à chaque fin de prise de notes, Esh essayait de refermer le stylo du professeur, soucieux que l'encre ne sèche pas, mais n'y parvenait pas avec une pression, comme avec celui qu'il possédait à la maison. Évidemment, Esh ne serait pas égal à lui-même si le simple besoin de fermer ce stylo n'avait pas complètement occupé toutes ses pensées, au point de ne plus écouter un seul mot de ce que le professeur disait.

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̶ Qu'est-ce que tu fais ? Arrête, tu vas le casser ! lui chuchota Dany, d'un ton inquiet.

Esh le regarda d'un air dubitatif :

̶ Bien sûr que non, je veux juste le refermer afin que l'encre ne sèche pas. Concentre-toi plutôt sur ton cours au lieu de te soucier de mes affaires.

Il essaya par la suite d'appliquer une légère pression sur le stylo, mais la mine du stylo restait inlassablement à l'extérieur. Exaspéré, il tapa carrément la mine contre la table, mais sans résultat.

Mais il va se fermer ?! s'énerva-t-il, excédé de ne pas réussir une chose aussi simple.

Il tapa encore plus fort la mine contre la table, et elle se rétracta enfin à l'intérieur du stylo. Il donna ensuite un léger coup de coude à Dany pour lui montrer que celui-ci s'était inquiété pour rien :

̶ Regarde, j'ai compris comment la fermeture fonctionnait. Et devant les yeux catastrophés de son voisin, il fit ressortir la mine du stylo pour la retaper sur la table de toutes ses forces.

« BAM ! »

L'inévitable s'était produit : le stylo avait explosé sous le choc, et l'encre spirituellement compressée dans celui-ci se déversa sur la classe, tel un tsunami. Mais les principaux impactés étaient Esh et Dany, les plus proches de la zone de l'événement. Ils restèrent momentanément hébétés en voyant leurs visages devenus entièrement bleus puis...

̶ Pfff, tu ressembles à un singe des forêts.

̶ Haha. On voit que tu ne t'es pas vu dans une glace, même tes parents ne te reconnaîtraient pas.

Ils étaient tous les deux tellement pliés de rire, qu'ils n'arrivaient même plus à respirer, et cela, même quand le professeur, rouge de colère, et remis du choc initial, les avait envoyés dans le bureau du proviseur. Bien que Dany et lui s'étaient rapprochés au cours de ce début d'année, Esh sentait qu'une réelle complicité venait de se créer entre eux après cet incident, qu'ils nommèrent par la suite, l'armagedencre. Il n'est parfois pas nécessaire de subir des situations de vie ou de mort pour créer une réelle et solide amitié. Asperger toute sa classe d'encre en éclatant un stylo d'une valeur de dizaines de pièces d'or, puis en subir les conséquences, tel que le nettoyage des toilettes, à toutes les pauses de midi jusqu'à la fin du semestre, avait était suffisant.

Le moment le plus mémorable de cette journée fut quand leurs pères respectifs arrivèrent dans le collège, pour les réprimander et leur annoncer la vague de punitions qui les attendait. Ce fut d'ailleurs la première fois, depuis l'installation de la famille Olamote au sein du village, que les deux hommes avaient été vus publiquement d'accord entre eux.

Plus tard, Evelle lui avait même raconté qu'on avait entendu leurs réprimandes jusqu'à l'autre côté de la forêt, où elle effectuait des rondes pour protéger le village des vagues de créatures essayant de dépasser les frontières du village. Même les vagues de créatures voulant rentrer dans le village s'étaient atténuées, une grande partie d'entre elles avaient fait demi-tour, terrifiées par les vagues de colère qui étaient parvenues jusqu'à leurs oreilles.

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